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- PROFESSION DE
FOI DES THÉISTES
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- PAR LE COMTE
DA... AU R. D.,
- Traduite de
l'Allemand.
- (1768)
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- NOTICE: Tel est
l'intitulé de l'édition originale, in-8° de
39 pages sans date, mais dont parle d'Alembert dans sa lettre
du 15 juin 1768. Je ne sais quel est le comte Da...; mais,
d'après la lettre de d'Alembert, on peut croire qu'une
majuscule a eté oubliée dans le titre
après les initiales R. D., puisque d'Alembert dit la
Profession adressée au Roi De Prusse. (
.)
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- O vous , qui avez su porter
sur le trône la philosophie et la tolérance, qui
avez foulé à vos pieds les
préjugés, qui avez enseigné les arts de la
paix comme ceux de la guerre! joignez votre voix à la
nôtre, et que la vérité puisse triompher
comme vos armes.
- Nous sommes plus d'un
million d'hommes dans l'Europe qu'on peut appeler
théistes; nous osons en attester le dieu unique que nous
servons. Si l'on pouvait rassembler tous ceux qui, sans examen,
se laissent entraîner aux divers dogmes des sectes
où ils sont nés, s'ils sondaient leur propre
coeur, s'ils écoutaient leur simple raison, la terre
serait couverte de nos semblables.
- Il n'y a qu'un fourbe ou un
homme absolument étranger au monde qui ose nous
démentir quand nous disons que nous avons des
frères à la tête de toutes les
armées, siégeant dans tous les tribunaux,
docteurs dans toutes les Églises, répandus dans
toutes les professions, revêtus enfin de la puissance
suprême.
- Notre religion est sans
doute divine, puisqu'elle a été gravée
dans nos coeurs par Dieu même, par ce maître de la
raison universelle, qui a dit au Chinois, à un Indien,
au Tartare, et à nous: Adore-moi, et sois
juste.
- Notre religion est aussi
ancienne que le monde, puisque les premiers hommes n'en
pouvaient avoir d'autre, soit que ces premiers hommes se soient
appelés Adimo et Procriti dans une partie de l'Inde, et
Brama dans l'autre, ou Prométhée et Pandore ehez
les Grecs, ou Osireth et Iseth chez les Égyptiens, ou
qu'ils aient eu en Phénicie des noms que les Grecs ont
traduits par celui d'Eon; soit qu'enfin on veuille admettre les
noms d'Adam et d'Éve donnés à ces
premières créatures dans la suite des temps par
le petit peuple juif. Toutes les nations s'accordent en ce
point qu'elles ont anciennement reconnu un seul Dieu, auquel
elles ont rendu un culte simple et sans mélange, qui ne
put être infecté d'abord de dogmes
superstitieux.
- Notre religion, ô
grand homme! est donc la seule qui soit universelle, comme elle
est la plus antique et la seule divine. Nations
égarées dans le labyrinthe de mille sectes
différentes, le théisme est la base de vos
édifices fantastiques; c'est sur notre
vérité que vous avez fondé vos
absurdités. Enfants ingrats, nous sommes vos
pères, et vous nous reconnaissez tous pour vos
pères quand vous prononcez le nom de Dieu.
- Nous adorons depuis le
comrnencement des choses la Divinité unique,
éternelle, rémunératrice de la vertu et
vengeresse du crime; jusque-là tous les hommes sont
d'accord, tous répètent après nous cette
confession de foi.
- Le centre où tous
les hommes se réunissent dans tous les temps et dans
tous les lieux est donc la vérité, et les
écarts de ce centre sont donc le mensonge.
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- QUE DIEU EST LE
PÈRE DE TOUS LES HOMMES.
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- Si Dieu a fait les hommes,
tous lui sont également chers, comme tous sont
égaux devant lui; il est donc absurde et impie de dire
que le père commun a choisi un petit nombre de ses
enfants pour exterminer les autres en son nom.
- Or les auteurs des livres
juifs ont poussé leur extravagante fureur jusqu'à
oser dire que dans des temps très récents par
rapport aux siècles antérieurs, le Dieu de
l'univers choisit un petit peuple barbare, esclave chez les
Égyptiens, non pas pour le faire régner sur la
fertile Égypte, non pas pour qu'il obtînt les
terres de leurs injustes maîtres, mais pour qu'il
allât, à deux cent cinquante milles de Memphis,
égorger, exterminer de petites peuplades voisines de
Tyr, dont il ne pouvait entendre le langage, qui n'avaient rien
de commun avec lui, et sur lesquelles il n'avait pas plus de
droit que sur l'Allemagne. Ils ont écrit cette horreur:
donc ils ont écrit des livres absurdes et
impies.
- Dans ces livres remplis
à chaque page de fables contradictoires, dans ces livres
écrits plus de sept cents ans après la date qu'on
leur donne, dans ces livres plus méprisables que les
contes arabes et persans, il est rapporté que le Dieu de
l'univers descendit dans un buisson pour dire à un
pâtre âgé de quatre-vingts ans: « Otez
vos souliers...: que chaque femme de votre horde demande
à sa voisine, à son hôtesse, des vases d'or
et d'argent, des robes, et vous volerez les Égyptiens
»
- « Et je vous prendrai
pour mon peuple, et je serai votre Dieu . »
- « Et j'endurcirai le
coeur du pharaon, du roi . »
- « Si vous observez mon
pacte, vous serez mon peuple particulier sur tous les autres
peuples . »
- Josué parle ainsi
expressément à la horde hébraïque:
« S'il vous paraît mal de servir Adonaï,
l'option vous est donnée; choisissez aujourd'hui ce
qu'il vous plaira; voyez qui vous devez servir, ou les dieux
que vos pères ont adorés dans la
Mésopotamie, ou bien les dieux des Amorrhéens,
chez qui vous habitez . »
- Il est bien évident
par ces passages, et par tous ceux qui les
précèdent, que les Hébreux reconnaissaient
plusieurs dieux, que chaque peuplade avait le sien; que chaque
dieu était un dieu local, un dieu
particulier.
- Il est même dit dans
Ézechiel, dans Amos, dans le Discours de saint
Étienne, que les Hébreux n'adorèrent
point le dieu Adonaï dans le désert, mais Remphan
et Kium .
- Le même Josué
continue, et leur dit: « Adonaï est fort et jaloux.
»
- N'est-il donc pas
prouvé par tous ces témoignages que les
Hébreux reconnurent dans leur Adonaï une
espèce de roi visible aux chefs du peuple, invisible au
peuple, jaloux des rois voisins, et tantôt vainqueur,
tantôt vaincu.
- Qu'on remarque surtout ce
passage des Juges: « Adonaï marcha avec Juda, et se
rendit maître des montagnes, mais il ne put exterminer
les habitants des vallées, parce qu'ils abondaient en
chariots armés de faux »
- Nous n'insisterons pas ici
sur le prodigieux ridicule de dire qu'auprès de
Jérusalem les peuples avaient, comme à Babylone
des chars de guerre dans un malheureux pays ou il n'y avait que
des ânes; nous nous bornons à démontrer que
le dieu des Juifs était un dieu local, qui pouvait
quelque ehose sur les montagnes, et rien sur les
vallées: idée prise de l'ancienne mythologie,
laquelle admit des dieux pour les forêts, les monts, les
vallées et les fleuves.
- Et si on nous objecte que,
dans le premier chapitre de la Genèse, Dieu a
fait le ciel et la terre, nous répondons que ce chapitre
n'est qu'une imitation de l'ancienne cosmogonie des
Phéniciens
- très
antérieurs à l'établissement des Juifs en
Syrie; que ce premier chapitre même fut regardé
par les Juifs comme un ouvrage dangereux qu'il n'était
permis de lire qu'à vingt-cinq ans. Il faut surtout bien
remarquer que l'aventure d'Adam et d'Ève n'est
rappelée dans aucun des livres hébreux, et que le
nom d'Ève ne se trouve que dans Tobie, qui est
regardé comme apocryphe par toutes les communions
protestantes et par les savants catholiques.
- Si l'on voulait encore une
plus forte preuve que le dieu juif n'était qu'un dieu
local, la voici: un brigand nommé Jephté, qui est
à la tête des Juifs, dit aux députés
des Ammonites: « Ce que possède Chamos votre dieu
ne vous appartient-il pas de droit? Laissez-nous donc
posséder ce qu'Adonaï notre dieu a obtenu par ses
victoires . »
- Voilà nettement deux
dieux reconnus, deux dieux ennemis l'un de l'autre: c'est bien
en vain que le trop simple Calmet veut après des
commentateurs de mauvaise foi, éluder une
vérité si claire. Il en résulte qu'alors
le petit peuple juif ainsi que tant de grandes nations avaient
leurs dieux particuliers: c'est ainsi que Mars combattit pour
les Troyens, et Minerve pour les Grecs; c'est ainsi que, parmi
nous, saint Denis est le protecteur de la France et que saint
Georges l'a été de l'Angleterre. C'est ainsi que
partout on a déshonoré la
Divinité.
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- DES
SUPERSTITIONS.
-
- Que la terre entière
s'élève contre nous, si elle l'ose; nous
l'appelons à témoin de ]a pureté de
notre sainte religion. Avons-nous jamais souillé notre
culte par aucune des superstitions que les nations se
reprochent les unes aux autres? On voit les Perses, plus
excusables que leurs voisins, vénérer dans le
soleil l'image imparfaite de la Divinité qui anime la
nature; les Sabéens adorent les étoiles; les
Phéniciens sacrifient aux vents; la Grèce et Rome
sont inondées de dieux et de fables; les Syriens adorent
un poisson. Les Juifs, dans le désert, se prosternent
devant un serpent d'airain; ils adorèrent
réellement un coffre que nous appelons arche,
imitant en cela plusieurs nations qui promenaient leurs petits
marmousets sacrés dans des coffres; témoin les
Égyptiens, les Syriens; témoin le coffre dont il
est parlé dans l'Ane d'or d'Apulée
témoin le coffre ou l'arche de Troie, qui fut pris par
les Grecs, et qui tomba en partage à Euripide
.
- Les Juifs
prétendaient que la verge d'Aaron et un boisseau de
manne étaient conservés dans leur saint coffre,
deux boeufs le traînaient dans une charrette; le peuple
tombait devant lui la face contre terre, et n'osait le
regarder. Adonaï fit un jour mourir de mort subite
cinquante mille soixante et dix Juifs pour avoir porté
la vue sur son coffre, et se contenta de donner des
hémorroïdes aux Philistins qui avaient pris son
coffre, et d'envoyer des rats dans leurs champs ,
jusqu'à ce que ces Philistins lui eussent
présenté cinq figures de rats d'or, et cinq
figures de trou du cul d'or, en lui rendant son coffre. O
terre! ô nations! ô vérité sainte!
est-il possible que l'esprit humain ait été assez
abruti pour imaginer des superstitions si infâmes et des
fables si ridicules ?
- Ces mêmes Juifs, qui
prétendent avoir eu les figures en horreur par l'ordre
de leur Dieu même, conservaient pourtant dans leur
sanctuaire, dans leur saint des saints, deux chérubins
qui avaient des faces d'homme et des mufles de boeuf avec des
ailes.
- A l'égard de leurs
cérémonies, y a-t-il rien de plus
dégoûtant, de plus révoltant, et en
même temps de plus puéril ? N'est-il pas bien
agréable à l'Etre des êtres de brûler
sur une pierre des boyaux et des pieds d'animaux ? Qu'en
peut-il résulter qu'une puanteur insupportable? Est-il
bien divin de tordre le cou à un oiseau, de lui casser
une aile, de tremper un doigt dans le sang, et d'en arroser
sept fois l'assemblé ?
- Où est le
mérite de mettre du sang sur l'orteil de son pied droit,
et au bout de son oreille droite, et sur le pouce de la main
droite ?
- Mais ce qui n'est pas si
puéril, c'est ce qui est raconté dans une
très ancienne vie de Moïse écrite en
hébreu, et traduite en latin. C'est l'origine de la
querelle entre Aaron et Coré.
- « Une pauvre veuve
n'avait qu'une brebis; elle la tondit pour la première
fois; aussitôt Aaron arrive, et emporte la toison en
disant: Les prémices de la laine appartiennent à
Dieu. La veuve en pleurs vient implorer la protection de
Coré, qui, ne pouvant obtenir d'Aaron la restitution de
la laine, en paye le prix à la veuve. Quelque temps
après, sa brebis fait un agneau. Aaron ne manque pas de
s'en emparer. Il est écrit, dit-il, que tout premier
né appartient à Dieu. La bonne femme va se
plaindre à Coré, et Coré ne peut obtenir
justice pour elle. La veuve, outrée, tue sa brebis.
Aaron revient sur-le-champ, prend le ventre, l'épaule et
la tête, selon l'ordre de Dieu. La veuve, au
désespoir, dit anathème à sa brebis. Aaron
dans l'instant revient, l'emporte tout entière: Tout ce
qui est anathème, dit-il, appartient au pontife . »
Voilà en peu de mots l'histoire de beaucoup de
prêtres: nous entendons les prêtres de
l'antiquité, car, pour ceux d'aujourd'hui, nous avouons
qu'il en est de sages et de charitables pour qui nous sommes
pénétrés d'estime.
- Ne nous appesantissons pas
sur les superstitions odieuses de tant d'autres nations; toutes
en ont été infectées, excepté les
lettrés chinois, qui sont les plus anciens
théistes de la terre. Regardez ces malheureux
Égyptiens, que leurs pyramides, leur labyrinthe, leurs
palais, et leurs temples, ont rendus si célèbres;
c'est au pied de ces monuments presque éternels qu'ils
adoraient des chats et des crocodiles. S'il est aujourd'hui une
religion qui ait surpassé ces excès monstrueux,
c'est ce que nous laissons à examiner à tout
homme raisonnable.
- Se mettre à la place
de Dieu, qui a crée l'homme, créer Dieu à
son tour, faire ce Dieu avec de la farine et quelques paroles,
diviser ce Dieu en mille dieux, anéantir la farine avec
laquelle on a fait ces mille dieux qui ne sont qu'un Dieu en
chair et en os; créer son sang avec du vin, quoique le
sang soit, à ce qu'on prétend, déjà
dans le corps de Dieu; anéantir ce vin, manger ce Dieu
et boire son sang, voilà ce que nous voyons dans quelque
pays, où cependant les arts sont mieux cultivés
que chez les Égyptiens.
- Si on nous racontait un
pareil excès de bêtise et d'aliénation
d'esprit de la horde la plus stupide des Hottentots et des
Cafres, nous dirions qu'on nous en impose; nous renverrions une
telle relation au pays des fables: c'est cependant ce qui
arrive journellement sous nos yeux dans les villes les plus
policées de l'Europe, sous les yeux des princes qui le
souffrent, et des sages qui se taisent. Que faisons-nous
à l'aspect de ces sacriléges? Nous prions l'Etre
éternel pour ceux qui les commettent, si pourtant nos
prières peuvent quelque chose auprès de son
immensité, et entrent dans le plan de sa
providence.
-
-
-
- DES SACRIFICES
DE SANG HUMAIN.
-
- Avons-nous jamais
été coupables de la folle et horrible
superstition de la magie, qui a porté tant de peuples
à présenter aux prétendus dieux de l'air
et aux prétendus dieux infernaux les membres sanglants
de tant de jeunes gens et de tant de filles, comme des
offrandes précieuses à ces monstres imaginaires?
Aujourd'hui même encore, les habitants des rives du
Gange, de l'Indus et des côtes de Coromandel, mettent le
comble de la sainteté à suivre en pompe de jeunes
femmes riches et belles qui vont se brûler sur le
bûcher de leurs maris, dans l'espérance
d'être réunies avec eux dans une vie nouvelle. Il
y a trois mille ans que dure cette épouvantable
superstition, auprès de laquelle le silence ridicule de
nos anachorètes, leur ennuyeuse psalmodie, leur mauvaise
chère, leurs cilices, leurs petites macérations,
ne peuvent pas même être comptés pour des
pénitences. Les brames ayant, après des
siècles d'un théisme pur et sans tache,
substitué la superstition à l'adoration simple de
l'Être suprême, corrompirent leurs voies et
encouragèrent enfin ces sacrifices. Tant d'horreur ne
pénétra point à la Chine, dont le sage
gouvernement est exempt, depuis près de cinq mille ans,
de toutes les démences superstitieuses Mais elle se
répandit dans le reste de notre
hémisphère. Point de peuple qui n'ait
immolé des hommes à Dieu, et point de peuple qui
n'ait eté séduit par l'illusion affreuse de la
magie. Phéniciens, Syriens, Scythes, Persans,
Égyptiens, Africains, Grecs, Romains, Celtes, Germains,
tous ont voulu être magiciens, et tous ont
été religieusement homicides.
- Les Juifs furent toujours
infatués de sortiléges; ils jetaient les sorts,
ils enchantaient les serpents, ils prédisaient l'avenir
par les songes, ils avaient des voyants qui faisaient retrouver
les choses perdues; ils chassèrent les diables et
guérirent les possédés avec la racine
barath en prononçant le mot Jaho, quand ils eurent connu
la doctrine des diables en Chaldée. Les pythonisses
évoquèrent des ombres; et même l'auteur de
l'Exode, quel qu'il soit, est si persuadé de
l'existence de la magie qu'il représente les sorciers
attitrés de Pharaon opérant les mêmes
prodiges que Moïse. Ils changèrent leurs
bâtons en serpents comme Moïse, ils
changèrent les eaux en sang comme lui, ils couvrirent,
comme lui, la terre de grenouilles, etc. Ce ne fut que sur
l'article des poux qu'ils furent vaincus; sur quoi on a
très bien dit que les Juifs en savaient plus que les
autres peuples en cette partie.
- Cette fureur de la magie,
commune à toutes les nations, disposa les hommes
à une cruauté religieuse et infernale avec
laquelle ils ne sont certainement pas nés, puisque de
mille enfants vous n'en trouvez pas un seul qui aime à
verser le sang humain.
- Nous ne pouvons mieux faire
que de transcrire ici un passagc de l'auteur de la
Philosophie de l'Histoire , quoiqu'il ne soit pas de notre
avis en tout.
- « Si nous lisions
l'histoire des Juifs, écrite par un auteur d'une autre
nation, nous aurions peine à croire qu'il y ait eu en
effet un peuple fugitif d'Egypte, qui soit venu par ordre
exprès de Dieu immoler sept ou huit petites nations
qu'il ne connaissait pas, égorger sans
miséricorde toutes les femmes, les vieillards et les
enfants à la mamelle, et ne réserver que les
petites filles; que ce peuple saint ait été puni
de son Dieu quand il avait été assez criminel
pour épargner un seul homme dévoué
à l'anathème. Nous ne croirions pas qu'un peuple
si abominable eût pu exister sur la terre; mais, comme
cette nation elle-même nous rapporte tous ces faits dans
ses livres saints, il faut la croire.
- « Je ne traite point
ici la question si ces livres ont été
inspirés. Notre sainte Eglise, qui a les Juifs en
horreur, nous apprend que les livres juifs ont
été dictés par le Dieu créateur et
père de tous les hommes; je ne puis en former aucun
doute, ni me permettre même le moindre
raisonnement.
- « I1 est vrai que
notre faible entendement ne peut concevoir dans Dieu une autre
sagesse, une autre justice, une autre bonté que celle
dont nous avons l'idée; mais enfin il a fait ce qu'il a
voulu: ce n'est pas à nous de le juger; je m'en tiens
toujours au simple historique.
- « Les Juifs ont une
loi par laquelle il leur est expressément ordonné
de n'épargner aucune chose, aucun homme
dévoué au Seigneur; on ne pourra le racheter,
il faut qu'il meure, dit la loi du Lévitique,
chapitre XXVII . C'est en vertu de cette loi qu'on voit
Jephté immoler sa propre fille, le prêtre Samuel
couper en morceaux le roi Agag. Le Pentateuque nous dit que,
dans le petit pays de Madian, qui est environ de neuf lieues
carrées, les Israélites ayant trouvé six
cent soixante-quinze mille brebis, soixante et douze mille
boeufs, soixante et un mille ânes, et trente-deux mille
filles vierges, Moïse commanda qu'on massacrât tous
les hommes, toutes les femmes et tous les enfants, mais qu'on
gardât les filles, dont trente-deux seulement furent
immolées. Ce qu'il y a de remarquable dans ce
dévouement, c'est que ce même Moïse
était gendre du grand-prêtre des Madianites
Jéthro, qui lui avait rendu les plus signalés
services, et qui l'avait comblé de
bienfaits.
- « Le même livre
nous dit que Josué , fils de Nun, ayant passé
avec sa horde la rivière du Jourdain à pied sec,
et ayant fait tomber au son des trompettes les murs de Jericho
dévoué à l'anathème, il fit
périr tous les habitants dans les flammes; qu'il
conserva seulement Rahab la paillarde et sa famille, qui avait
caché les espions du saint peuple; que le même
Josué dévoua à la mort douze mille
habitants de la ville de Haï; qu'il immola au Seigneur
trente et un rois du pays, tous soumis à
l'anathème, et qui furent pendus. Nous n'avons rien de
comparable à ces assassinats religieux dans nos derniers
temps, si ce n'est peut-être la Saint-Barthelemy et les
massacres d'Irlande.
- « Ce qu'il y a de
triste, c'est que plusieurs personnes doutent que les Juifs
aient trouvé six cent soixante et quinze mille brebis et
trente-deux mille filles pucelles dans le village d'un
désert au milieu des rochers, et que personne ne doute
de la Saint-Barthélémy. Mais ne cessons de
répéter combien les lumières de notre
raison sont impuissantes pour nous éclairer sur les
étranges événements de l'antiquité,
et sur les raisons que Dieu, maître de la vie et de la
mort, pouvait avoir de choisir le peuple juif pour exterminer
le peuple chananéen. »
- Nos chrétiens, il le
faut avouer, n'ont que trop imité ces anathèmes
barbares tant recommandés chez les Juifs: c'est de ce
fanatisme que sortirent les croisades qui
dépeuplèrent l'Europe pour aller immoler en Syrie
des Arabes et des Turcs à Jésus-Christ; c'est ce
fanatisme qui enfanta les croisades contre nos frères
innocents appelés hérétiques; c'est
ce fanatisme toujours teint de sang qui produisit la
journée infernale de la Saint-Barthélémy;
et remarquez que c'est dans ce temps affreux de la
Saint-Barthélémy que les hommes étaient le
plus abandonnés à la magie. Un prêtre
nommé Séchelle, brûlé pour avoir
joint aux sortiléges les empoisonnements et les
meurtres, avoua, dans son interrogatoire, que le nombre de ceux
qui se croyaient magiciens passait dix-huit mille: tant la
démence de la magie est toujours compagne de la fureur
religieuse, comme certaines maladies épidémiques
en amènent d'autres, et comme la famine produit souvent
la peste.
- Maintenant, qu'on ouvre
toutes les annales du monde, qu'on interroge tous les hommes,
on ne trouvera pas un seul théiste coupable de ces
crimes. Non, il n'y en a pas un qui ait jamais prétendu
savoir l'avenir au nom du diable, ni qui ait été
meurtrier au nom de Dieu.
- On nous dira que les
athées sont dans les mêmes termes; qu'ils n'ont
jamais été ni des sorciers ridicules, ni des
fanatiques barbares. Hélas! que faudra-t-il en conclure?
que les athées, tout audacieux, tout
égarés qu'ils sont, tout plongés dans une
erreur monstrueuse, sont encore meilleurs que les Juifs, les
païens et les chrétiens fanatiques.
- Nous condamnons
l'athéisme, nous détestons la superstition
barbare, nous aimons Dieu et Ie genre humain: voilà nos
dogmes.
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-
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- DES
PERSÉCUTIONS
CHRÉTIENNES.
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- On a tant prouvé que
la secte des chrétiens est la seule qui ait jamais voulu
forcer les hommes, le fer et la flamme dans les mains, à
penser comme elle, que ce n'est plus la peine de le redire. On
nous objecte en vain que les mahométans ont imité
les chrétiens; cela n'est pas vrai. Mahomet et ses
Arabes ne violentèrent que les Mecquois, qui les avaient
persécutés; ils n'imposèrent aux
étrangers vaincus qu'un tribut annuel de douze drachmes
par tête, tribut dont on pouvait se racheter en
embrassant la religion musulmane.
- Quand ces Arabes eurent
conquis l'Espagne et la province narbonnaise, ils leur
laissèrent leur religion et leurs lois. Il laissent
encore vivre en paix tous les chrétiens de leur vaste
empire Vous savez, grand prince, que le sultan des Turcs nomme
lui-même le patriarche des chrétiens grecs et
plusieurs évêques. Vous savez que ces
chrétiens portent leur Dieu en procession librement dans
les rues de Constantinople, tandis que, chez les
chrétiens, il est de vastes pays où l'on condamne
à la potence ou à la roue tout pasteur calviniste
qui prêche, et aux galères quiconque les
écoute. O nations! comparez et jugez.
- Nous prions seulement les
lecteurs attentifs de relire ce morceau d'un petit livre
excellent , qui a paru depuis peu, intitulé Conseils
raisonnables, etc. .
- « Vous parlez toujours
de martyrs. Eh! monsieur, ne sentez-vous pas combien cette
misérable preuve s'élève contre nous?
Insensés et cruels que nous sommes, quels barbares ont
jamais fait plus de martyrs que nos barbares ancêtres ?
Ah ! monsieur, vous n'avez donc pas voyagé ? vous n'avez
pas vu à Constance la place où
Jérôme de Prague dit à un des bourreaux du
concile, qui voulait allumer son bûcher par
derrière: Allume par devant; si j'avais craint les
flammes je ne serais pas venu ici. Vous n'avez pas
été à Londres, où, parmi tant de
victimes que fit brûler l'infâme Marie, fille du
tyran Henri VIII, une femme accouchant au pied du bûcher,
on y jeta l'enfant avec la mère par l'ordre d'un
évêque.
- « Avez-vous jamais
passé dans Paris par la Grève, ou le
conseiller-clerc Anne Dubourg, neveu du chancelier, chanta des
cantiques avant son supplice? Savez-vous qu'il fut
exhorté a cette héroïque constance par une
jeune femme de qualité, nommée Mme de Lacaille,
qui fut brûlée quelques jours après lui?
Elle était chargée de fers dans un cachot voisin
du sien, et ne recevait le jour que par une petite grille
pratiquée en haut, dans le mur qui séparait ces
deux cachots. Cette femme entendait le conseiller qui disputait
sa vie contre ses juges par les formes des lois. Laissez
là, lui cria-t-elle, ces indignes formes;
craignez-vous de mourir pour votre Dieu?
- « Voilà ce
qu'un indigne historien tel que le jésuite Daniel n'a
garde de rapporter; et ce que d'Aubigné et les
contemporains nous certifient.
- « Faut-il vous montrer
ici la foule de ceux qui furent executés à Lyon,
dans la place des Terreaux, depuis 1546? Faut-il vous faire
voir Mlle de Cagnon suivant, dans une charrette, cinq autres
charrettes chargées d'infortunés condamnés
aux flammes parce qu'ils avaient le malheur de ne pas croire
qu'un homme pût changer du pain en Dieu ? Cette fille,
malheureusement persuadée que la religion
réformée est la véritable, avait toujours
répandu des largesses parmi les pauvres de Lyon. Ils
entouraient, en pleurant, la charrette où elle
était traînée chargée de fers.
Hélas! lui criaient-ils, nous ne recevrons
plus d'aumones de vous,óEh bien! dit-elle, vous
en recevrez encore; et elle leur jeta ses mules de velours,
que ses bourreaux lui avaient laissées.
- « Avez-vous vu la
place de l'Estrapade à Paris ? Elle fut couverte, sous
Francois Ier, de corps réduits en cendre. Savez-vous
comme on les faisait mourir? On les suspendait à de
longues bascules qu'on élevait et qu'on baissait tour
à tour sur un vaste bûcher, afin de leur faire
sentir plus longtemps toutes les horreurs de la mort la plus
douloureuse. On ne jetait ces corps sur les charbons ardents
que lorsqu'ils étaient presque entièrement
rôtis, et que leurs membres retirés, leur peau
sanglante et consumée, leurs yeux brûlés,
leur visage défiguré, ne leur laissaient plus
l'apparence de la figure humaine.
- « Le jésuite
Daniel suppose, sur la foi d'un infâme écrivain de
ce temps-là, que François Ier dit publiquement
qu'il traiterait ainsi le dauphin son fils s'il donnait dans
les opinions des réformés. Personne ne croira
qu'un roi, qui ne passait pas pour un Néron, ait jamais
prononcé de si abominables paroles. Mais la
vérité est que tandis qu'on faisait à
Paris ces sacrifices de sauvages, qui surpassent tout ce que
l'Inquisition a jamais fait de plus horrible, Francois Ier
plaisantait avec ses courtisans et couchait avec sa
maîtresse. Ce ne sont pas la, monsieur, des histoires de
sainte Potamienne, de sainte Ursule, et des onze mille vierges:
c'est un récit fidèle de ce que l'histoire a de
moins incertain.
- « Le nombre des
martyrs réformés, soit vaudois, soit albigeois,
soit évangéliques, est innombrable. Un
nommé Pierre Bergier fut brûlé à
Lyon en 1552, avec René Poyet, parent du chancelier
Poyet. On jeta dans le même bûcher Jean Chambon,
Louis Dimonet, Louis de Marsac, Étienne de Gravot, et
cinq jeunes écoliers. Je vous ferais trembler si je vous
faisais voir la liste des martyrs que les protestants ont
conservée.
- « Pierre Bergier
chantait un psaume de Marot en allant au supplice. Dites-nous
en bonne foi si vous chanteriez un psaume latin en pareil cas ?
Dites-nous si le supplice de la potence, de la roue, ou du feu,
est une preuve de la religion? C'est une preuve sans doute de
la barbarie humaine; c'est une preuve que d'un
côté il y a des bourreaux, et de l'autre des
persuadés.
- « Non, si vous voulez
rendre la religion chrétienne aimable ne parlez jamais
de martyrs. Nous en avons fait cent fois, mille fois plus que
tous les païens. Nous ne voulons point
répéter ici ce qu'on a tant dit des massacres des
albigeois, des habitants de Mérindol, de la
Saint-Barthélemy, de soixante ou quatre-vingt mille
Irlandais protestants égorgés, assommés,
pendus, brûlés par les catholiques; de ces
millions d'Indiens tués comme des lapins dans des
garennes, aux ordres de quelques moines. Nous
frémissons, nous gémissons; mais, il faut le
dire, parler de martyrs à des chrétiens, c'est
parler de gibets et de roues à des bourreaux ct à
des recors. »
- Après tant de
vérités, nous demandons au monde entier si jamais
un théiste a voulu forcer un homme d'une autre religion
à embrasser le théisme, tout divin qu'il est. Ah!
c'est parce qu'il est divin qu'il n'a jamais violenté
personne. Un théiste a-t-il jamais tué? que disje
? a-t-il frappé un seul de ses insensés
adversaires? Encore une fois, comparez et jugez.
- Nous pensons enfin qu'il
faut imiter le sage gouvernement chinois qui, depuis plus de
cinquante siècles, offre à Dieu des hommages
purs, et qui, l'adorant en esprit et en vérité,
laisse la vile populace se vautrer dans la fange des
étables des bonzes. Il tolère ces bonzes, et il
les réprime, il les contient si bien, qu'ils n'ont pu
exciter le moindre trouble sous la domination chinoise ni sous
la tartare. Nous allons acheter dans cette terre antique de la
porcelaine, du laque, du thé, des paravents, des magots,
des commodes, de la rhubarbe, de la poudre d'or: que
n'allons-nous y acheter la sagesse!
-
-
-
- DES
MOEURS.
-
- Les moeurs des
théistes sont nécessairement pures, puisqu'ils
ont toujours le Dieu de la justice et de la pureté
devant les yeux, le Dieu qui ne descend point sur la terre pour
ordonner qu'on vole les Égyptiens, pour commander
à Osée de prendre une concubine à prix
d'argent, et de coucher avec une femme adultère
.
- Aussi ne nous voit-on pas
vendre nos femmes comme Abraham. Nous ne nous enivrons point
comme Noé, et nos fils n'insultent pas au membre
respectable qui les a fait naître. Nos filles ne couchent
point avec leurs pères, comme les filles de Loth et
comme la fille du pape Alexandre VI. Nous ne violons point nos
soeurs, eomme Amnon viola sa soeur Thamar. Nous n'avons point
parmi nous de prêtres qui nous aplanissent la voie du
crime en osant nous absoudre de la part de Dieu de toutes les
iniquités que sa loi éternelle condamne. Plus
nous méprisons les superstitions qui nous environnent,
plus nous nous imposons la douce necessité d'être
justes et humains. Nous regardons tous les hommes avec des yeux
fraternels; nous les secourons indistinctement; nous tendons
des mains favorables aux superstitieux qui nous
outragent.
- Si quelqu'un parmi nous
s'écarte de notre loi divine, s'il est injuste et
perfide envers ses amis, ingrat envers ses bienfaiteurs, si son
orgueil inconstant et féroce contriste ses
frères, nous le déclarons indigne du saint nom de
théiste, nous le rejetons de notre
société, mais sans lui vouloir de mal, et
toujours prêts à lui faire du bien;
persuadés qu'il faut pardonner, et qu'il est beau de
faire des ingrats.
- Si quelqu'un de nos
frères voulait apporter le moindre trouble dans le
gouvernement, il ne serait plus notre frère. Ce ne
furent certainement pas des théistes qui
excitèrent autrefois les révoltes de Naples, qui
ont trempé récemment dans la conspiration de
Madrid, qui allumèrent les guerres de la Fronde et des
Guises en France, celle de Trente ans dans notre Allemagne,
etc., etc., etc. Nous sommes fidèles à nos
princes, nous payons tous les impôts sans murmures. Les
rois doivent nous regarder comme les meilleurs citoyens et les
meilleurs sujets. Séparés du vil peuple qui
n'obéit qu'à la force, et qui ne raisonne jamais,
plus séparés encore des théologiens, qui
raisonnent si mal, nous sommes les soutiens des trônes,
que les disputes ecclésiastiques ont
ébranlés pendant tant de
siècles.
- Utiles à
l'État, nous ne sommes point dangereux à
l'Église; nous imitons Jésus, qui allait au
temple.
-
-
-
- DE LA DOCTRINE
DES THÉISTES.
-
- Adorateurs d'un Dieu ami
des hommes, compatissants aux superstitions même que nous
réprouvons, nous respectons toute société,
nous n'insultons aucune secte, nous ne parlons jamais avec
dérision, avec mépris, de Jésus, qu'on
appelle le Christ; au contraire, nous le regardons comme
un homme distingué entre les hommes par son zèle,
par sa vertu, par son amour de l'égalité
fraternelle; nous le plaignons comme un réformateur
peut-être un peu inconsidéré, qui fut la
victime des fanatiques persécuteurs.
- Nous révérons
en lui un théiste israélite, ainsi que nous
louons Socrate, qui fut un théiste athénien.
Socrate adorait un Dieu, et l'appelait du nom de
père, comme le dit son évangéliste
Platon. Jésus appela toujours Dieu du nom de
père, et la formule de prière qu'il
enseigna eommence par ces mots, si communs dans Platon,
Notre père. Ni Socrate ni Jésus
n'écrivirent jamais rien. Ni l'un ni l'autre n'institua
une religion nouvelle. Certes, si Jésus avait voulu
faire une religion, il l'aurait écrite. S'il est dit que
Jésus envoya ses disciples pour baptiser, il se conforma
à l'usage. Le baptême était d'une
très haute antiquité chez les Juifs;
c'était une cérémonie sacrée,
empruntée des Égyptiens et des Indiens, ainsi que
presque tous les rites judaïques. On baptisait tous les
prosélytes chez les Hébreux. Les mâles
recevaient le baptême après la circoncision. Les
femmes prosélytes étaient baptisées; cette
cérémonie ne pouvait se faire qu'en
présence de trois anciens au moins, sans quoi la
régénération était nulle. Ceux qui,
parmi les Israélites, aspiraient à une plus haute
perfection, se faisaient baptiser dans le Jourdain.
Jésus lui-même se fit baptiser par Jean, quoique
aucun de ses apôtres ne fût jamais
baptisé.
- Si Jésus envoya ses
disciples pour chasser les diables, il y avait
déjà très longtemps que les Juifs
croyaient guérir des possédés et chasser
des diables. Jésus même l'avoue dans le livre qui
porte le nom de Matthieu . Il convient que les enfants
même chassaient les diables.
- Jésus, à la
vérité, observa toutes les institutions
judaïques; mais, par toutes ses invectives contre les
prêtres de son temps, par les injures atroces qu'il
disait aux pharisiens, et qui lui attirèrent son
supplice, il paraît qu'il faisait aussi peu de cas des
superstitions judaïques que Socrate des superstitions
athéniennes.
- Jésus n'institua
rien qui eût le moindre rapport aux dogmes
chrétiens; il ne prononce jamais le mot de
chrétien: quelques-uns de ses disciples ne
prirent ce surnom que plus de trente ans après sa
mort.
- L'idée d'oser faire
d'un Juif le créateur du ciel et de la terre n'entra
certainement jamais dans la tête de Jésus. Si l'on
s'en rapporte aux Evangiles, il était plus
éloigné de cette étrange prétention
que la terre ne l'est du ciel. Il dit expressément avant
d'être supplicié: « Je vais à mon
père, qui est votre pére, à mon Dieu, qui
est votre Dieu . »
- Jamais Paul, tout ardent
enthousiaste qu'il était, n'a parlé de
Jésus que comme d'un homme choisi par Dieu même
pour ramener les hommes à la justice.
- Ni Jésus, ni aucun
de ses apôtres, n'a dit qu'il eût deux natures et
une personne avec deux volontés; que sa mère
fût mère de Dieu; que son esprit fût la
troisième personne de Dieu, et que cet esprit
procédât du Père et du Fils. Si l'on trouve
un seul de ces dogmes dans les quatre Évangiles,
qu'on nous le montre; qu'on ôte tout ce qui lui est
étranger, tout ce qu'on lui a attribué en divers
temps au milieu des disputes les plus scandaleuses et des
conciles qui s'anathématisèrent les uns les
autres avec tant de fureur, que reste-t-il en lui? Un adorateur
de Dieu qui a prêché la vertu, un ennemi des
pharisiens, un juste, un théiste; nous osons dire que
nous sommes les seuls qui soient de sa religion, laquelle
embrasse tout l'univers dans tous les temps, et qui par
conséquent est la seule véritable.
-
-
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- QUE TOUTES LES
RELIGIONS DOIVENT RESPECTER LE
THÉISME.
-
- Après avoir
jugé par la raison entre la sainte et éternelle
religion du théisme ct les autres religions si
nouvelles, si inconstantes, si variables dans leurs dogmes
contradictoires, si abandonnées aux superstitions, qu'on
les juge par l'histoire et par les faits, on verra dans le seul
christianisme plus de deux cents sectes différentes, qui
crient toutes: « Mortels, achetez chez moi; je suis la
seule qui vend la vérité, les autres
n'étalent que l'imposture. »
- Depuis Constantin, on le
sait assez, c'est une guerre perpétuelle entre les
chrétiens; tantôt bornée aux sophismes, aux
fourberies, aux cabales, à la haine, et tantôt
signalée par les carnages.
- Le christianisme, tel qu'il
est, et tel qu'il n'aurait pas dû être, se fonda
sur les plus honteuses fraudes: sur cinquante évangiles
apocryphes; sur les constitutions apostoliques reconnues pour
supposées; sur des fausses lettres de Jésus, de
Pilate, de Tibère, de Sénèque, de Paul;
sur les ridicules récognitions de Clément; sur
l'imposteur qui a pris le nom d'Hermas; sur l'imposteur Abdias,
l'imposteur Marcel, l'imposteur Hégésippe; sur la
supposition de misérables vers attribués aux
sibylles; et après cette foule de mensonges vient une
foule d'interminables disputes.
- Le mahométisme, plus
raisonnable en apparence, et moins impur, annoncé par un
seul prophète prétendu, enseignant un seul Dieu,
consigné dans un seul livre authentique, se divise
pourtant en deux sectes qui se combattent avec le fer, et en
plus de douze qui s'injurient avec la plume.
- L'antique religion des
brachmanes souffre depuis longtemps un grand schisme: les uns
tiennent pour le Shastabad, les autres pour
l'Othorabad. Les uns croient la chute des animaux
célestes, à la place desquels Dieu forma l'homme,
fable qui passa ensuite en Syrie, et même chez les Juifs
du temps d'Hérode. Les autres enseignent une cosmogonie
contraire.
- Le judaïsme, le
sabisme, la religion de Zoroastre, rampent dans la
poussière. Le culte de Tyr et de Carthage est
tombé avec ces puissantes villes. La religion des
Miltiades et des Périclès, celle des
Paul-Émile et des Caton, ne sont plus; celle d'Odin est
anéantie; les mystères et les monstres
d'Égypte ont disparu; la langue même d'Osiris,
devenue celle des Ptolémées, est ignorée
de leurs descendants: le théisme seul est resté
debout parmi tant de vicissitudes, et, dans le fracas de tant
de ruines, immuable comme le Dieu qui en est l'auteur et
l'objet éternel.
-
-
-
- BÉNÉDICTIONS
SUR LA TOLÉRANCE.
-
- Soyez béni à
jamais, sire. Vous avez établi chez vous la
liberté de conscience. Dieu et les hommes vous en ont
récompensé. Vos peuples multiplient, vos
richesses augmentent, vos États prospèrent, vos
voisins vous imitent; cette grande partie du monde devient plus
heureuse.
- Puissent tous les
gouvernements prendre pour modèle cette admirable loi de
la Pennsylvanie, dictée par le pacifique Penn, et
signée par le roi d'Angleterre Charles II, le 8 mars
1681!
- « La liberté de
conscience étant un droit que tous les hommes ont
reçu de la nature avec l'existence, il est fermement
établi que personne ne sera jamais forcé
d'assister à aucun exercice public de religion. Au
contraire, il est donné plein pouvoir à chacun de
faire librement exercice public ou privé de sa religion,
sans qu'on le puisse troubler en rien, pourvu qu'il fasse
profession de croire un Dieu éternel, tout-puissant,
formateur et conservateur de l'univers. »
- Par cette loi, le
théisme a été consacré comme le
centre où toutes les lignes vont aboutir, comme le seul
principe nécessaire. Aussi qu'est-il arrivé? Ia
colonie pour laquelle cette loi fut faite n'était alors
composée que de cinq cents têtes; elle est
aujourd'hui de trois cent mille. Nos Souabes, nos
Saltzbourgeois, nos palatins, plusieurs autres colons de notre
basse Allemagne, des Suédois, des Holstenois, ont couru
en foule à Philadelphie. Elle est devenue une des plus
belles et des plus heureuses villes de la terre, et la
métropole de dix villes considérables. Plus de
vingt religions sont autorisées dans cette province
florissante, sous la protection du théisme leur
père, qui ne détourne point les yeux de ses
enfants, tout opposés qu'ils sont entre eux, pourvu
qu'ils se reconnaissent pour frères. Tout y est en paix,
tout y vit dans une heureuse simplicité, pendant que
l'avarice, l'ambition, l'hypocrisie, oppriment encore les
consciences dans tant de provinces de notre Europe: tant il est
vrai que le théisme est doux, et que la superstition est
barbare.
-
-
-
- QUE TOUTE
RELIGION REND TÉMOIGNAGE AU
THÉISME.
-
- Toute religion rend,
malgré elle, hommage au théisme, quand même
elle le persécute. Ce sont des eaux corrompues
partagées en canaux dans des terrains fangeux, mais la
source est pure. Le mahométan dit: « Je ne suis ni
juif ni chrétien; je remonte à Abraham: il
n'était point idolâtre; il adorait un seul Dieu.
» Interrogez Abraham: il vous dira qu'il était de
la religion de Noé, qui adorait un seul Dieu. Que
Noé parle, il confessera qu'il était de la
religion de Seth, et Seth ne pourra dire autre chose, sinon
qu'il était de la religion d'Adam, qui adorait un seul
Dieu.
- Le juif et le
chrétien sont forcés, comme nous l'avons vu , de
remonter à la même origine. Il faut qu'ils avouent
que, suivant leurs propres livres, le théisme a
régné sur la terre jusqu'au déluge,
pendant 1656 ans selon la Vulgate, pendant 2262 ans
selon les Septante, pendant 2309 ans selon les
Samaritains; et qu'ainsi, à s'en tenir au plus
faible nombre, le théisme a été la seule
religion divine pendant 2513 années, jusqu'au temps
où les juifs disent que Dieu leur donna une loi
particulière dans un désert.
- Enfin, si le calcul du P.
Pétau était vrai; si, selon cet étrange
philosophe, qui a fait, comme on l'a dit, tant d'enfants
à coups de plume , il y avait six cent vingt-trois
milliards six cent douze millions d'hommes sur la terre,
descendants d'un seul fils de Noé; si les deux autres
frères en avaient produit chacun autant; si par
conséquent la terre fut peuplée de plus de
dix-neuf cents milliards de fidèles en l'an 285
après le déluge, et cela vers le temps de la
naissance d'Abraham selon Pétau; et si les hommes, en ce
temps-là, n'avaient pas corrompu leurs voies, il
s'ensuit évidemment qu'il y eut alors environ dix-neuf
cents milliards de théistes de plus qu'il n'y a
aujourd-hui d'hommes sur la terre.
-
-
-
- REMONTRANCE A
TOUTES LES RELIGIONS.
-
- Pourquoi donc vous
élevez-vous aujourd'hui avec tant d'acharnement contre
le théisme, religions nées de son sein; vous qui
n'avez de respectable que l'empreinte de ses traits
défigurés par vos superstitions et par vos
fables; vous filles parricides, qui voulez détruire
votre père, quelle est la cause de vos continuelles
fureurs? Craignez-vous que les théistes ne vous traitent
comme vous avez traité le paganisme, qu'ils ne vous
enlévent vos temples, vos revenus, vos honneurs?
Rassurez-vous, vos craintes sont chimériques: les
théistes n'ont point de fanatisme, ils ne peuvent donc
faire de mal, ils ne forment point un corps, ils n'ont point de
vues ambitieuses; répandus sur la surface de la terre,
ils ne l'ont jamais troublée; l'antre le plus infect des
moines les plus imbéciles peut cent fois plus sur la
populace que tous les théistes du monde; ils ne
s'assemblent point, ils ne prêchent point; ils ne font
point de cabales. Loin d'en vouloir aux revenus des temples,
ils souhaitent que les églises, les mosquées, les
pagodes de tant de villages, aient toutes une subsistance
honnête; que les curés, les mollas, les brames,
les talapoins, les bonzes, les lamas des campagnes, soient plus
à leur aise, pour avoir plus de soin des enfants
nouveau-nés, pour mieux secourir les malades, pour
porter plus décemment les morts à la terre ou au
bûcher; ils gémissent que ceux qui travaillent le
plus soient les moins récompensés.
- Peut-être sont-ils
surpris de voir des hommes voués par leurs serments
à l'humilité et à la pauvreté
revêtus du titre de prince, nageant dans l'opulence, et
entourés d'un faste qui indigne les citoyens.
Peut-être ont-ils été
révoltés en secret, lorsqu'un prêtre d'un
certain pays a imposé des lois aux monarques, et des
tributs à leurs peuples. Ils désireraient, pour
le bon ordre, pour l'équité naturelle, que chaque
État fût absolument indépendant; mais ils
se bornent à des souhaits, et ils n'ont jamais
prétendu ramener la justice par la violence.
- Tels sont les
théistes: ils sont les frères aînés
du genre humain, et ils chérissent leurs frères.
Ne les haïssez donc pas; supportez ceux qui vous
supportent; ne faites point de mal à ceux qui ne vous en
ont jamais fait; ne violez point l'antique précepte de
toutes les religions du monde qui est celui d'aimer Dieu et les
hommes.
- Théologiens, qui
vous combattez tous, ne combattez plus ceux dont vous tenez
votre premier dogme. Muphti de Constantinople, shérif de
la Mecque, grand brame de Bénarès,
dalaï-lama de Tartarie qui êtes immortel,
évêque de Rome qui êtes infaillible, et
vous, leurs suppôts, qui tendez vos mains et vos manteaux
à l'argent comme les Juifs à la manne, jouissez
tous en paix de vos biens et de vos honneurs, sans haïr,
sans insulter, sans persécuter les innocents, les
pacifiques théistes, qui, formés par Dieu
même tant de siècles avant vous, dureront aussi
plus que vous dans la multitude des siècles.
RÉSIGNATION, ET NON GLOIRE, A DIEU; IL EST TROP
AU-DESSUS DE LA GLOIRE.
Last modified: 21-Mar-00