- TEXTES EN ORTHOGRAPHE
HISTORIQUE

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- 101
- Pour l' amour de Dieu et pour le salut commun du peuple
chrétien et le nôtre, à partir de ce jour,
autant que Dieu m' en donne le savoir et le pouvoir, je
soutiendrai mon frère Charles de mon aide en toute
chose, comme on doit justement soutenir son frère,
à condition qu' il m' en fasse autant, et je ne prendrai
jamais aucun arrangement avec Lothaire, qui, à ma
volonté, soit au détriment de mondit frère
Charles.
- Serments de Strasbourg, in R. BALIBAR; L' institution du
français, Paris, PUF, 1985, p.21 (traduction)
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- 102
- «Pro Deo amur et pro christian poblo et nostro commun
salvament, d' ist di in avant, in quant Deus savir et podir me
dunat, si salvarai eo cist meon fradre Karlo et in aiudha et in
cadhuna cosa, si cum om per dreit son fradra salvar dift, in o
quid il mi altresi fazet et ab Luther nul plaid nunquam
prindrai, qui, meon vol, cist meon fradre Karle in damno
sit.»
- Serments de Strasbourg, in R. BALIBAR; L' institution du
français, Paris, PUF, 1985, p.69 (original)
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- 103
- "Rollant ferit en une perre bise.
- Plus en abat que jo ne vos sai dire.
- L'espee cruist, ne fruisset ne ne brise,
- Cuntre ciel amunt est resortie.
- Quant veit li quens que ne la freindrat mie,
- Mult dulcement la pleinst a sei meïsme:
- «E! Durendal, cum es bele e seintisme!"
- "La Chanson de Roland" (début du XIIº
siècle (?)), vers 2338-2345.
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- 104
- "Signor, oiiés, tot li amant,
- cil qui d'amors se vont penant,
- li chevalier et les puceles,
- li damoisel, les damoiseles!
- Se mon conte volés entendre,
- molt i porrés d'amors aprendre.
- "Le conte de Floire et Blancheflor" (1160 ?), v. 1 à
6
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- 105
- «Sachiez que .M. et .C. et quatre vinz et .XVII. anz
aprés l'incarnation Nostre Sengnor Jesu Crist, al tens
Innocent, apostoille de Rome, et Phelippe, roy de France, et
Ricchart, roy d'Engleterre, ot un saint home en France, qui ot
nom Folques de Nuilli (cil Nuillis si est entre Ligni sor Marne
e Paris) ...»
- (Sachez que mille cent quatre-vingt-dix-sept ans
après l'incarnation de Notre-Seigneur
Jésus-Christ, au temps d'lnnocent, pape de Rome, et de
Philippe, roi de France, et de Richard, roi d'Angleterre, il y
eut en France un saint homme, qui avait nom Foulques de Neuilly
(ce Neuillly est entre Lagny-sur-Marne et Paris)
- Villehardouin racontant la conquête de Constantinople
(1203), d'après texte et traduction de E. Faral,
«Les Belle Lettres», 1972, p. 3-4, (collection G.
Budé).
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- 106
- He Dieu, se j'eusse estudié
- Au tems de ma jeunese folle
- Et a bonnes meurs dedié,
- J'eusse maison et couche molle.
- Mais quoi, je fuyois l'escolle,
- Come fait le mauvais enfan.
- En escripvant ceste parolle,
- A peu que le cueur ne me fent.
- François Villon, "Le Testament" (1462), vers
201-208
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- 107
- "Grandgousier estoit bon raillard en son temps, aymant
à boyre net autant que homme qui pour lors fust au
monde, et mangeoit voluntiers salé. A ceste fin, avoit
ordinairement bonne munition de jambons de Magence et de
Baionne, force langues de beuf fumées, abondance de
andouilles en la saison et beuf sallé à la
moustarde (
) En son eage virile espousa Gargamelle, fille
du roy des Parpillos, belle gouge et de bonne troigne, et
faisoient eux deux souvent ensemble la beste à deux doz,
joyeusement se frotans leur lard, tant qu'elle engroissa d'un
beau filz et le porta jusques à l'unziesme moys."
- Rabelais, "Gargantua", (1542) Chap, III
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- 108
- Enfants, oyez une leçon:
- Nostre langue a ceste façon,
- Que le terme qui va devant
- Voluntiers regist le suyvant. [
]
- Il faut dire en termes parfaits:
- Dieu en ce monde nous a faits;
- Faut dire en paroles parfaites:
- Dieu en ce monde les a faites;
- Et ne faut point dire en effet:
- Dieu en ce monde les a fait;
- Ne nous a fait pareillement,
- Mais nous a faits, tout rondement.
- C. Marot, "Oeuvres", Epigramme CIX
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- 109
- «Pour moy ie n'ay iamais presumé que mon esprit
fust en rien plus parfait que ceux du commun: mesme i'ai
souuent souhaité d'auoir la pensee aussy prompte, ou
l'imagination aussy nette et distincte, ou la memoire aussy
ample, ou aussy presente, que quelques autres.»
- Descartes, "Discours de la méthode", Corpus des
oeuvres de philosophie en langue française, Fayard,
1986, p.8
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- 110
- Nosseigneurs Academiques,
- Nosseigneurs Hypercritiques,
- Souuerains arbitres des mots,
- Doctes faiseurs d'auant-propos,
- Cardinal-Historiographes,
- Surintendans des Orthographes,
- Ratiocineurs de Loclltions,
- Entrepreneurs de Versions,
- Peseur de breues et de longues
- De voyelles & de Diphtongues.
- Ménage, "Requeste à Messieurs de l'Academie
pour la reformation de la langue françoise" (1636)
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- 111
- O rage, ô désespoir, ô vieillesse
ennemie !
- N'ayje donc tant vescu que pour cette infamie ?
- Et ne suisje blanchy dans les trauaux guerriers
- Que pour voir en vn iour flestrir tant de lauriers?
- [
]
- Sous moy donc cette troupe s'auance
- Et porte sur le front une masle asseurance
- Nous partismes cinq cens, mais par un prompt renfort
- Nous nous vismes trois mille en arriuant au port.
- Corneille, "Le Cid" (1635)
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- 112
- "Tout vous est Aquilon, tout me semble Zephir.
- Legere et court vestuë, elle alloit à grands
pas.
- Un jour sur ses longs pieds alloit je ne sçais
où
- Du goujon? c'est bien-là le disné d'un
Héron!
- Amans, heureux amans, voulez-vous voyager?
- Ah! si mon coeur osoit encor se renflâmer!
- Un Curé s'en alloit gayment
- Enterrer ce mort au plus viste."
- La Fontaine, "Fables" (1668)
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- 113
- "a angers mecredy 20e sep
- iariue hier a cinq heures au pont de se, apres auoir veu le
matin a saumur ma niece de bussy, et entandu la messe a la
bonne nostre dame, ie trouuè sur le bort de ce pont vn
carosse a six cheuaux qui me parut estre mon fils, cestoit son
carosse, et labé charyes quil enuoyé me receuoir
parce quil est vn peu malade aux rochers, Cet abé me fut
agreable il a vne petite impression de grignan par son pere, et
par vous auoir veue qui luy donna vn pris, au dessus de tout ce
qui pouuoit venir au deuant de moy, il me donna vostre
lettre."
- Mme de Sévigné, "Lettres", (1684)
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- 114
- "Que je me suis abusé, Mademoiselle, dans ma
premiere Lettre! Au-lieu de soulager mes maux, je n'ai fait que
les augmenter en m'exposant à votre disgrace, et je sens
que le pire de tous est de vous déplaire. Votre silence,
votre air froid et reservé ne m'annoncent que trop mon
malheur. Si vous avez éxaucé ma priere en partie,
ce n'est que pour mieux m'en punir. Vous retranchez en public
l'innocente familiarité dont j'eus la folie de me
plaindre; mais vous n'en êtes que plus
sévére dans le particulier, et votre
ingénieuse rigueur s'exerce également par votre
complaisance et par vos refus. Que ne pouvez-vous
connoître combien cette froideur m'est cruelle! vous me
trouveriez trop puni.
- J.J. Rousseau, "Nouvelle-Héloïse" (1763), I,
2
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