3.5.Distribution des voyelles à double timbre
 
Parallèlement à l'apprentissage des tendances syllabiques, la maîtrise de la compréhension et de l'expression implique aussi l'analyse d'une autre caractéristique essentielle de la syllabation du français parlé: la distribution complémentaire (le maintien ou la neutralisation) du timbre des voyelles à double timbre. Ce dernier point constitue l'une des difficultés de prononciation majeures du FLE, tant par les facteurs impliqués que par la variabilité des contraintes que subissent ces voyelles.
 
3.5.1. Timbre vocalique et contraintes distributionnelles
 
Parallèlement à ses caractéristiques articulatoires , chacune des voyelles du français peut être définie par le fait qu'elle implique un certain nombre de contraintes (51) et justifie la formulation d'un certain nombre de règles de réalisation. Elle constitue en quelque sorte une unité de prononciation de fonctionnement spécifique.
Quatre ensembles de familles vocaliques peuvent être distinguées par l'ensemble de contraintes et de règles distributionnelles qu'elles impliquent:
 
-les voyelles nasales: //, //, //, //
-les semi-voyelles: /j/, //, /w/
-la voyelle sourde: //.
-les voyelles à double timbre: /A/, /E/, /O/, /OE/
 
Nous ne retiendrons, pour la présente étude, qu'une analyse comparative des règles distributionnelles des voyelles à double timbre, et, plus précisément, celles qui sont communes aux deux phonétismes français et portugais: /E/ et /O/ (52)
 
Un certain nombre de contraintes pèsent sur les voyelles françaises à double timbre /E/ et /O/, que l'on peut définir de la façon suivante:
 
-la contrainte distributionnelle: la réalisation d'une voyelle est avant tout conditionnée par des facteurs de distribution associés:
 
-à la structure de la syllabe (fermée - ouverte)
-à la consonne qui ferme la syllabe: // dans "port", /o/ dans "chose"
-à la place par rapport à l'accent: en syllabe accentuée (finale, en français) le timbre est toujours défini.
 
Cette contrainte est d'essence phonétique (articulatoire): elle fait donc partie du conditionnement à acquérir préalablement en FLE.
 
-la contrainte phonologique: elle rend compte de la possibilité de réaliser les deux timbres (il n'y a donc pas neutralisation de l'un des deux) en distribution identique pour distinguer des contextes sémantiques: "saute" [sot] - "sotte" [st].
Cette contrainte fait référence à la sémantique et à la morphologie et requiert donc une connaissance poussée de la langue et de ses mécanismes grammaticaux.
 
-la contrainte graphique: ce sont les cas inclassables à ramener à des graphies ponctuelles: "ô" et "au" sont des orthographismes qui donnent en français /o/.
La contrainte graphique fait référence à la graphie et à l'étymologie et requiert une connaissance poussée de la langue écrite.
 
-la réalisation libre: dans ce cas, les deux timbres sont équivalents (aucun facteur ne les neutralise), ce qui revient en français à réaliser un timbre moyen.
 
 
3.5.2.La contrainte accentuelle
 
Notons la nécessité de distinguer entre syllabes accentuées et syllabes non accentuées pour traduire les cas où la syllabe considérée est caractéristique du rythme français. Les syllabes accentuées se trouvent en français en fin de mot, et plus généralement, en fin d'énoncé (accent syntaxique) (53), et découpent la chaîne parlée en groupes de syllabes égales, caractérisées par leur régularité et leur stabilité: il n'y a pas, en français, au contraire du portugais, de phénomène d'effacement de syllabes (de voyelles) non accentuées, mais au contraire, maintien systématique et distinct des syllabes intermédiaires et de leurs voyelles (sauf pour le cas spécial de //).
Au contraire, pour les langues à accent de mot, comme le portugais, toute syllabe est accentuable, quelle que soit sa position. L'accent, par sa variabilité, peut donc se manifester par une altération du timbre lorsque la voyelle qui le reçoit passe de l'état de syllabe accentuée à l'état de syllabe non accentuée (ou inversement). La voyelle qui perd son accent n'est sujette, en français, à aucun relâchement de l'articulation, mais, en portugais, cela aboutit à un complexe système de réduction de voyelles toniques en atones.
Ainsi, l'analyse contrastive des voyelles à double timbre ne peut ignorer le facteur accentuel, malgré l'aspect secondaire qu'il assume en français: la référence à la place de l'accent s'avère nécessaire pour comparer les voyelles du français avec celles du portugais, étant donné que les réalisations vocaliques portugaises sont conditionnées par la position de l'accent. En fait, le système vocalique portugais -et plus précisément le système des voyelles à double timbre- ne peut se comparer avec son homologue français que si l'on part du principe que la composante accentuelle joue en portugais le rôle que joue en français la contrainte syllabique.
 
3.5.3.Interférences des voyelles à double timbre
 
Nous proposons à la suite une série de tableaux distributionnels des voyelles à double timbre /E/ et /O/, où sont consignées les interférences et indiqués les apprentissages à acquérir pour la juste prononciation de ces sons dans la chaîne parlée. La présentation a été conçue (54) pour faciliter une approche contrastive avec les voyelles à double timbre portugaises.
Ces tableaux distributionnels proposent d'abord l'étude de l'interaction des contraintes et des règles articulatoires subies par les voyelles à double timbre /E/ et /O/, et, ensuite, le relevé des interférences distributionnelles existantes. Ces modèles semblent en effet particulièrement adéquats à l'élaboration d'une analyse contrastive systématique des deux phonétismes.
Ces tableaux distributionnels sont suivis par des tableaux d'interférences sur lesquels sont portés l'ensemble des phénomènes d'interférence en FLE.
 
 
 
3.5.4.Tableau distributionnel de la voyelle /E/
 
3.5.4.1.Distribution des timbres en français
 
 
 
3.5.4.2.Distribution des timbres de /E/ en portugais
 
 
3.5.5.Tableau des interférences des timbres de /E/
 
 
Il est possible d'établir un relevé des mécanismes d'apparition d'interférences au niveau des voyelles à double timbre. La comparaison systématique des tableaux distributionnels de chaque langue fait apparaître les points de conflit et permet l'élaboration d'un tableau prévisionnel d'interférences de timbres.
Le tableau d'interférences présenté ci-dessous ne consiste pas à reprendre l'information donnée par les tableaux distributionnels: il se limite à signaler les points de conflit ou ( plus rarement) les points de convergence (transferts). Dans le premier cas, la prévision établit comment les réflexes articulatoires maternels seront transférés vers la langue étrangère; dans le second cas, la prévision établit comment les habitudes maternelles bloqueront l'apprentissage de la langue étrangère (55)
 
 
 
 
 
3.5.6.Tableau distributionnel de la voyelle /O/
 
3.5.6.1.Distribution des timbres en français
 
 
3.5.6.2.Distribution des timbres en portugais
 
 
3.5.7.Tableau des interférences des timbres de /O/
 
Ce deuxième tableau prévisionnel laisse prévoir que la maîtrise de la voyelle /O/ sera, en FLE, assez délicate, étant donné les différences nombreuses entre les distributions de /O/ dans les deux langues.
Ainsi, l' observation attentive des tableaux d'interférence construits nous indique que français et portugais possèdent des habitudes orales extrêmement diversifiées pour distribuer leurs voyelles à double timbre. Il n'est donc pas surprenant de constater que le nombre d'interférences relevées est largement supérieur aux possibilités de transfert.
Ainsi, dans la classe de FLE, la maîtrise complète et satisfaisante du français parlé, en plus de l'acquisition des compétences grammaticales et lexicales habituelles, doit être complétée par une initiation méthodique à la prononciation et par un reconditionnement systématique des habitudes articulatoires (56)
 
 
 
4.CONCLUSION
 
4.1.Interférences et enseignement du français
 
On peut conclure de l'idée d'interférence que l'auditeur du FLE se trouve le plus souvent dans la nécessité de déchiffrer les phonèmes de sa propre langue lorsqu'il entend parler français. Dans un sens, c'est sa propre langue qu'il écoute (57) En conséquence, il sera parfaitement insensible aux différences phonémiques propres au français si la même différence n'existe pas en portugais. Un exemple simple est celui des conséquences fonctionnelles de la prononciation de certaines consonnes finales françaises: par exemple, dans le cas du quantitatif "tout", l'omission de /t/ équivaut au masculin /tu/ ("tout") , alors que la prononciation de la consonne finale équivaut au féminin: /tut/ ("toute"). L'absence d'un phénomène de marque orale de genre identique en portugais fait que la plupart des lusophones sont insensibles à ce type d'accord grammatical oral (l'un des plus fréquents en français parlé), et font systématiquement des fautes du type: "elles sont toutes venues" *[lstuvny].
La scolarité peut difficilement remédier à ces interférences: l'élève continuera vraisemblablement à appliquer ses propres oppositions phonologiques au détriment de celles du français, étant donné que l'enracinement des habitudes articulatoires résiste aux capacités correctives de l'enseignement de la prononciation (58) Les fautes de compétence sont d'une part systématiques (elles définissent un parler ou un accent constants de l'élève), et, d'autre part, représentent un état achevé ou définitif du sujet parlant. La raison pour laquelle elles sont si difficiles à exterminer, c'est que les habitudes du français arrivent "trop tard" (ce qui n'est pas le cas dans une situation de bilinguisme). La force du système phonologique maternel vient donc de son inertie et du fait que les automatismes articulatoires acquis gênent toute acquisition contradictoire (59)
On pourrait peut-être être tenté d'en conclure qu'après tout ceci tient aux conditions mêmes de l'acquisition d'une langue étrangère, et que, par ailleurs, ces interférences ne concernent que des aspects purement secondaires (quasi-obligatoires) du contact avec une langue de communication comme le français (60)
En fait, ces interférences en FLE constituent des circonstances aggravantes puisqu'elles perturbent aussi bien l'acquisition des normes du code graphique: ceci pose en effet beaucoup de problèmes en FLE écrit, d'abord parce les mots impliquent parfois une prononciation inconnue en portugais, ensuite souvent parce qu'il n'y a pas, même en français, de rapport évident entre la prononciation et la graphie de ces mots (61)
 
4.2.La place du français parlé en FLE
 
En langue étrangère en particulier, toute compétence linguistique et culturelle de l'élève doit être complétée avantageusement par une compétence articulatoire et orale. L'enseignement de la prononciation ne peut donc être détourné ou absent du processus didactique, puisque lui seul assure l'apprentissage des mécanismes de décodage de la réalité linguistique (écoute de messages oraux, entraînement à la compréhension, opérations de communications) et le contrôle des mécanismes de la production orale (par l'effort porté sur la qualité sonore des messages produits). Si la place de la composante phonique reste à définir, elle n'en apparaît pas moins comme indispensable dans toute tentative de contact langagier. C'est alors en fait le rôle de l'enseignant lui même comme modèle qui doit être (re)pensé (62)
Convaincu que la connaissance de la langue française implique une réflexion à la fois sur l'écrit et sur l'oral, indispensable à la formation des futurs enseignants aussi bien du point de vue de leur compétence individuelle que du point de vue de leur intervention didactique, je pense que les domaines oral et écrit doivent être menés de pair, qu'il faut systématiquement les comparer et les opposer, d'abord comme objets spécifiques, puis comme parties d'une description linguistique globale.
 
 
L'enseignant de FLE doit donc être convaincu du fait que, sans le recours au français parlé, la maîtrise de la grammaire reste incomplète; que, par contre, s'il domine raisonnablement certains micro-systèmes grammaticaux propres à l'oral (marques du nombre, etc), sa compétence en ce domaine lui ouvrira d'une part l'accès à des activités fondées sur l'oral et, d'autre part, lui donnera la possibilité d'interpréter les fautes de prononciation et de corriger les interférences commises par ses élèves. Pour lui, la notion de norme aura un sens précis dans le contexte pédagogique, étant donné que sa compétence en français parlé concerne justement le respect d'une norme articulatoire. Pour faire sentir cette norme, il pourra, par exemple, se référer à sa propre pratique du français parlé, ou, le cas échéant, se servir de supports magnétiques.
Une bonne connaissance du français parlé de la part de l'enseignant de FLE aura donc pour conséquence une acquisition facilitée de la prononciation française au niveau des apprenants. Cette formation en français parlé permettra à l'enseignant, entre autres:
 
-de montrer à ses élèves que, derrière les apparences d'incohérence du code oral (qui souvent découragent l'élève), il existe des régularités susceptibles d'être intégrées dans un système descriptif;
-de diriger et faciliter les opérations d'identification de phonèmes réalisées par l'élève;
-de développer des automatismes d'acquisition et reconnaissance de mots et d'unités dans la chaîne parlée.
 
Il faut enseigner les phonèmes, non seulement en soi (leurs articulations, les faire répéter jusqu'à obtenir une bonne prononciation), mais aussi enseigner à les reconnaître et à réaliser les oppositions avec lesquelles le phonème en question risque d'être confondu. Les phonèmes changent de fonction lorsque, dans la chaîne parlée, ils sont en rapport avec d'autres phonèmes: d'où la nécessité d'enseigner les diverses relations de ce phonème aux autres: les diverses positions dans lesquels on peut les trouver, etc. Conséquence pratique pour le professeur de prononciation française: les habitudes articulatoires ne jouant aucun rôle dans la communication ne présentent aucun intérêt pédagogique (ex: les articulations parallèles du /R/ en français).
.
 
4.3.[bR] ou [bR] ? Le problème de la norme en FLE
 
Se pose aussi le problème du choix de la norme par le professeur: quel usage décrire et prescrire? Doit-on imposer en FLE la distinction "brun" - "brin", considérée comme normative, mais extérieure à beaucoup de parlers francophones? En fait, il est souhaitable de commencer par enseigner en se fondant sur un idiolecte, considéré isolé et défini synchroniquement, et, ensuite, d'ajouter au fur et à mesure des variations possibles, c'est-à-dire comparer divers idiolectes du français. Dans cette situation, la connaissance précise de la prononciation française de la part de l'enseignant revêt un caractère fondamental.
La question de la norme mène à des questions annexes, comme celle-ci: outre les fréquences d'emploi des phonèmes, il faudrait aussi s'intéresser aux fréquences d'emploi des oppositions de phonèmes: quelles sont les pertinences les plus fréquentes en français, par exemple? Qu'en est-il des oppositions // - //, // - /:/, /a/ - //? Etant donné leur basse fréquence, faut-il les enseigner quand même? Ou faut-il au contraire n'enseigner que les oppositions stables, délaissant les autres, distinguant entre système phonologique standard et système phonologique périphérique? Cela aboutit à distinguer, par exemple, des voyelles fondamentales et des voyelles périphériques, les premières étant communes à tous les idiolectes et étant donc essentielles en FLE. Il faut donc enseigner et insister sur /y/, par exemple, mais pas forcément sur //. Il peut sembler suffisant, en FLE, d'enseigner un système phonologique restreint, réduit à des principes généraux. Le fait d'enseigner un système phonologique incluant toutes les oppositions possibles risquerait en fait de n'enseigner le système phonologique d'aucun locuteur en particulier.
Distinguons donc entre description théorique, pour laquelle toute la réalité du système phonologique du français doit être considérée, et linguistique appliquée au FLE, où la question du choix est importante, puisque le professeur peut tirer parti d'une sélection et d'une hiérarchisation des faits phonologiques, et exiger des élèves qu'ils dominent seulement ce système restreint. Tous les faits de prononciation non-fondamentaux seront par la suite (éventuellement) introduits progressivement, de façon à aboutir à une description globale.
Dominer de façon satisfaisant le FLE parlé consiste donc à connaître d'abord le système phonologique fondamental, puis le système phonologique périphérique, l'un ne pouvant aller sans l'autre si le contact avec la langue telle qu'elle se parle dans la pratique est l'objectif final de l'enseignant.
En effet, à un enseignement du "savoir parler" correctement en FLE (distinguer donc les caractéristiques du système phonologique fondamental), il faut ajouter la nécessité d'enseigner à "savoir entendre", c'est-à-dire l'aptitude à percevoir et distinguer les variations périphériques du système phonologique français: c'est en particulier le rôle de la composante du cours de FLE reposant sur les supports mécaniques (cassettes, enregistrements, etc). Ecouter parler un Français de son débit de voix et de son intonation habituels et le comprendre malgré tout est un test éprouvant en FLE, même à l'université...
 
4.4.Le français parlé à l'université.
 
De ce qui précède, nous pouvons conclure que l'enseignement du FLE au niveau supérieur doit intégrer avec bonheur la composante orale.
En première année, l'oral doit occuper une place privilégiée, et les élèves doivent être mis en contact avec un éventail très large de textes en français parlé, ceci à travers l'audition systématique de documents audio et vidéo. Il faut, à ce niveau, sensibiliser l'étudiant à la variété et aux variations du français parlé, et faciliter leur compétence communicative en français. Les étudiants doivent donc devenir des interlocuteurs compétents, aussi bien comme récepteurs (compréhension orale) que comme producteurs de discours (expression).
Dans le cadre de ces deux composantes, doit apparaître aussi une description métalinguistique introduisant des éléments de réflexion sur divers aspects du français parlé comme l'intonation, les variantes phonétiques ou les structures syntaxiques les plus fréquentes à l'oral. Cette métalangue doit, entre autres, s'appuyer sur la phonétique et la phonologie.
 
Notes 
 
1.Idée soutenue, entre autres, par les auteurs de la "Grammaire Larousse" (voir préface). Par ailleurs, Claire BLANCHE-BENVÉNISTE résume ainsi la position sur ce sujet de certains grammairiens (P. Imbs, par exemple): "La langue parlée, c'est bon pour l'exotisme; la description de la langue parlée vaut pour les dialectes et les patois; elle vaut aussi pour les langues sans écriture, dites "exotiques"; mais pas pour une langue de culture comme le français." (Claire BLANCHE-BENVÉNISTE, "Le français parlé", p.6)
 

2."L'usage que l'on fait de l'opposition entre "français parlé et français écrit est la plupart du temps tout à fait équivoque; cela revient à limiter le français parlé à un domaine très étroit, celui du français "familier", voire "vulgaire", et à le comparer à un français écrit "correct". Le parlé, c'est ce qu'on n'écrit pas habituellement, compte tenu des règles de bienséance de l'écrit. A ce compte, le français parlé qui sort de cette opposition est toujours du français "fautif" (op. cit., p.20)

 

3."Nous avons intitulé cette première partie "Les grands mythes séparateurs" pour résumer l'idée, constante dans ce genre d'études, que le français parlé doit être un secteur isolé du reste de la langue française; idée complètement opposée à notre perspective, qui est d'intégrer la description du français parlé à une grammaire d'ensemble du français."(op. cit., p.5)

 

4.Par exemple, le "Groupe Aixois de Recherche en Syntaxe" (GARS), animé par Claire BLANCHE-BENVÉNISTE, Université de Provence.

 

5.cf. le titre d'un article de Claire BLANCHE-BENVÉNISTE, in "Recherches sur le français parlé", nº5: "L'importance du 'français parlé' pour la description du français tout court."

 

6.Expression de CALLAMAND M., in "Méthodologie de l'enseignement de la prononciation", p 6

 

7. "Il est important pour la compréhension des phénomènes d'apprentissage des langues, de bien noter que si on consent à oublier la première langue apprise, on en apprend une seconde beaucoup plus facilement." A. MARTINET, "Le parler et l'écrit", in "De la théorie linguistique à l'enseignement de la langue", p.54

 

8 ."Cette impression trouve sur le plan psycho-linguistique une justification: en effet, l'organisation structurée et hiérarchisée de la phrase permet d'en dégager les constituants immédiats et il s'opère alors pour l'auditeur une sorte de prédictibilité de l'information". CALLAMAND M., "Méthodologie de l'enseignement de la prononciation", p 6

 

9. "Hallucinations auditives", expression de STUBBS, M., in "Discourse analysis. The sociolinguistic Analysis of Natural Language", Oxford, Basil Blackwell, 1983, citée par Claire BLANCHE-BENVÉNISTE, "Le français parlé", p.6

 

10.Cf. C. CUNHA, L. CINTRA, "Nova gramática do português contemporâneo", Lisboa, João Sá da Costa, 1984, pp. 36-40

 

11.cf. Maria Raquel DELGADO MARTINS, "Sept études sur la perception", thèse de doctorat, INIC, 1982, p. 58

 

12. "L'interférence résulte d'un processus qui aboutit à la présence dans un système linguistique donné d'unités et souvent de modes d'agencement appartenant à un autre système". Andrée TABOURET-KELLER, "Où commence le bilinguisme?", in "De la théorie linguistique à l'enseignement des langues", p.164

 

13. A propos des interférences entre phonétismes, M. CALLAMAND précise: "La situation d'apprentissage d'une langue étrangère met nécessairement deux systèmes phoniques en conflit. Les habitudes acquises par la pratique de la langue maternelle ne seront que très rarement transférables et freineront l'acquisition des habitudes nouvelles requises par le système de la langue apprise." op. cit., p.70

 

14.Il serait d'ailleurs, sur ce modèle, possible d'étudier les interférences portugais/français à plusieurs autres niveaux: au niveau syntaxique (difficile, pour un Portugais, de nier avec "ne... pas", puisqu'en portugais il n'y a que "não"), au niveau lexical et au niveau morphologique. Nous nous limiterons ici aux interférences du système phonologique.

 

15. M. CALAMMAND rappelle les conditions particulières dans lesquelles le message oral est transmis, et qui, dans le cas de déficiences articulatoires graves, peut conduire à sa mise en cause: "La prononciation véhicule la totalité du message oral, et si un francophone peut toujours l'interpréter en dépit de distorsions phonétiques importantes, la communication en français entre utilisateurs non francophones risque d'être entravée." op. cit., p.5

 

16.L'opposition de longueur, pratiquement disparue en français moderne était très importante jusqu'au XVIIIº siècle, où on distinguait "vu" et "vue" par l'allongement de la voyelle dans le 2º mot. Cf. MARTINET, "Le français sans fard". Notons que cette opposition survit dans certains parlers périphériques (les français du Nord de la France et surtout le français méridional).

 

17. C. BLANCHE-BENVÉNISTE résume la question de la façon suivante: "comment présenter du parlé par écrit?" (op. cit. p.5)

 

18. Voir article cité (note 7 p.3).

 

19. Dubois parle, à ce propos, d' "autonomisation" de l'écrit: "[Le français] se présente sous deux aspects: un code parlé et un code graphique, le second, transcodage du premier, étant susceptible d'autonomisation." Cf. J. Dubois, "Grammaire structurale du français, nom et pronom", p.5

 

20. Ce qui est exceptionnel est une marque orale du nombre reposant sur la prononciation du "S": cela arrive pourtant, comme dans les cas de liaisons à valeur fonctionnelle: "petit enfant" [ptitf] et "petits enfants" [ptizf]. Dans ce cas, le "S" graphique correspond à la réalisation de la consonne de liaison /z/. Ces cas sont pourtant limités, et, pour trouver des marques orales de nombre en français au niveau des noms et adjectifs, il faut surtout se tourner vers les oppositions de suffixes, du type "cheval" [val] - "chevaux" [vo]. Cf. J. Dubois, "Grammaire structurale du français, nom et pronom". Nous noterons aussi que, de ce point de vue, la langue portugaise est loin d'offrir les mêmes ambiguités, puisque, au contraire du français, les marques orales de nombre sont en portugais systématiquement réalisées (Cf. E. ANDRADE PARDAL, "Aspects de la phonologie (générative) du portugais", Centro de Linguística, Universidade de Lisboa, 1977, pp.17-40) Un tel décalage dans le système des marques n'est pas sans conséquences sur le contrôle des micro-systèmes grammaticaux du français parlé.

 
21.Description effectuée à partir des ouvrages suivants:
-STEN, H, "Manuel de phonétique française", Copenhage, Munksgaard, 1966
-MERCIER, S, "Les sons fondamentaux du français", Paris, Hachette, 1976
-LÉON, P, "Prononciation du français standard", Paris, Didier, 1966
 

22. Cf. Celso Cunha, Lindley Cintra, "Nova gramática do português contemporâneo", Lisboa, João Sá da Costa, 1984, pp. 32-38

 

23.Cf. LÉON, P, "Prononciation du français standard", pp.27-31

 

24.D'après C. Cunha, L. Cintra, op. cit., p.45, et P. Léon, op. cit., p.78

 

25. Voir S. Mercier, op. cit., p.34

 

26.Voir S. Mercier, op. cit., p.42

 

27. Voir C. Cunha, L. Cintra, op. cit., p.42

 

28. P. LÉON, "Introduction à la phonétique corrective", Paris, Hachette-Larousse (BELC), 1980, pp. 9-11

 

29. Sur l'orthoépie des voyelles du français, consulter essentiellement P. LÉON:

-"Introduction à la phonétique corrective"
-"Prononciation du français standard"
 

30.Cf. le programme proposé par E. COMPANYS pour le français enseigné à des hispanophones, in "Phonétique française pour hispanophones", Paris, Hachette-Larousse (BELC), 1966, pp.15-18.

 

31.Cf. l'article de G. CALBRIS "La prononciation et la correction phonétique", op. cit.

 

32.Un prolongement possible de cette mise en parallèle serait l'élaboration d'une étude comparative de la grammaire du code oral de chaque langue: marques du nombre, du genre, morphologie verbale, etc. Le présent travail se limite volontairement, cependant, à l'étude de quelques principes phonologiques comparés.

 

33. D'après les indications fournies par P. LÉON, in "Prononciation du français standard."

 

34. Sans doute faut-il voir ici l'origine de l'une des fautes les plus déconcertantes du FLE: la réalisation de la voyelle /e/ pour la voyelle //. Dans certains mots (menace, religion, retour, etc), la présence d'une syllabe graphique contenant un "e muet" est en effet souvent interprétée comme s'il y avait effectivement un accent (que certains iront d'ailleurs jusqu'à écrire, emportés par l'erreur!): *[menas]. L'origine de ce trouble de la lecture et de la prononciation vient sans doute du fait que le "e muet" n'est pas automatiquement en français, à l'inverse du portugais, une voyelle atone, mais peut être prononcée à l'égal des autres.

 

35.Bien qu'une telle étude puisse être avantageusement appliquée au portugais, je n'ai trouvé pour cette langue aucune donnée sur les différences entre fréquences orales et graphiques.

 

36.D'après l'ouvrage collectif "Linguagem oral e ortografia", INIC, IN-CM, 1976, pp.98-102. A noter que je n'ai pu trouver, pour les besoins de ce travail, de registre de fréquences graphiques en portugais (sans doute cela existe-t-il), ce qui aurait été utile pour comparer le décalage oral/écrit de chaque langue.

 

37. Cela est vraisemblablement dû aux caractéristiques uniques de la consonne vibrante française: M. CALLAMAND fait remarquer que le /r/ présente parfois une articulation assez proche d'une structure vocalique (cela est vrai aussi pour la liquide /l/) (op. cit., p. 102)

 

38.C. CUNHA, L. CINTRA, op. cit., p.38

 

39. C. CUNHA, L. CINTRA emploient le mot "cultismo", op. cit., p.40

 

40. Mª Raquel DELGADO MARTINS, op. cit., p. 59

 

41. Cf. P. LÉON, op. cit..

 

42.Cf E. ANDRADE PARDAL, op. cit, pp. 93-100, chapitre intitulé "Alternances vocaliques du système verbal".

 

43.E. COMPANYS suggère de "faire sentir [aux élèves] que ces consonnes finales doivent être prononcées comme si elles étaient intervocaliques et qu'elles sont indépendantes de la voyelle précédente", et propose de tolérer, en initiation, la prononciation d'un "e muet" comme celui du français méridional (op. cit., p.20)

 

44.Une analyse plus fine permet même de conclure que ces groupes de consonnes n'existent pas en portugais, car les deux consonnes sont en fait séparées et appartiennent chacune à une syllabe différente: "es-co-lar" (trois syllabes).

 

45. On appelle syllabe ouverte, une syllabe terminée par une voyelle: /tro/ (trop) est une syllabe ouverte, la voyelle /o/ étant en finale. On appelle syllabe fermée, une syllabe se terminant par une consonne: /ta/ (tache) est une syllabe fermée, la consonne // étant en finale.

 

46.Indications fournies par P. LÉON, op. cit.

 

47.Cf. "Linguagem oral e ortografia", p. 102

 

48.Sur la liaison et ses emplois en français parlé, voir P. LÉON, "Prononciation du français standard", pp. 118-131

 

49.Signalons que les contextes articulatoire vérifiés aux jonctions des mots peuvent, en cas d'enchaînement en portugais, modifier les consonnes déplacées: ainsi, la consonne finale /ß/ (réalisée [s¯]), devient /‡/ devant consonne sonore, et /z/ devant voyelle.

 

50.Sur la notion de contrainte vocalique, voir M. CALLAMAND, "Méthodologie de l'enseignement de la prononciation". p.23

 

51. L'analyse que nous proposons peut aussi s'appliquer, nous le verrons, aux réalisations d'autres voyelles communes, comme le /A/, et surtout à l'ensemble du système des voyelles nasales des deux langues. Le choix de ce travail se justifie donc pour des raisons d'éxemplification.

 

52.Sur l'accent syntaxique voir par exemple P. LÉON; G. CALBRIS, "La prononciation et la correction phonétique", in "Guide pédagogique pour le professeur de français langue étrangère", p.62, précise: "La plupart des langues connaissent un accent de mot alors qu'en français il s'agit d'un accent de groupe."

 

53. Les modèles présentés sont inspirés par les tableaux proposés par M. CALLAMAND, op. cit., p.26. Leur application à l'analyse contrastive portugais / français me semble cependant originale.

 

54.Pour être complète, cette étude pourrait ensuite proposer des modèles, des phrases-types illustrant les conflits relevés destinées à l'apprentissage du FLE.

 

55. "L'étude contrastive des phénomènes distributionnels complète indéniablement les données de la phonétique acoustique et de la phonétique articulatoire; en apportant des indications, limitées mais précises, sur les facteurs contraignants dans l'une et l'autre langue, elle constitue la pièce maîtresse du projet méthodologique. Ainsi peut s'établir une hiérarchie fondée des éléments à traiter pour tel ou tel groupe linguistique." M CALLAMAND, op. cit., p.82

 

56.Cf. G. CALBRIS: "La langue maternelle établit des habitudes auditives et articulatoires. L'apprentissage d'une autre langue doit en établir de nouvelles, ce qui exige tout un reconditionnement, sinon l'individu entend et articule les sons de la langue étrangère sur la base du système des sons de sa langue maternelle. Plus ce dernier sera fixé et automatisé, plus le reconditionnement sera long et difficile.", in "La prononciation et la correction phonétique."

 

57.Certains orthoépistes, comme E. Companys, semblent pourtant considérer qu'il est toujours possible de corriger la majeure partie des vices de prononciation en FLE, même en provenance de systèmes phonologiques aussi éloignés que l'espagnol ou l'allemand. Cf E. COMPANYS, "Phonétique française pour hispanophones". De son côté, M. CALLAMAND affirme: "En matière de phonétique, l'apprentissage est sans doute pour une trés grande part fruit d'imitation &emdash;imitation d'un enseignant qui a lui-même une bonne prononciation et imitation d'un enseignant qui a un bagage suffisant pour proposer les exemples adéquats lorsque des productions fautives apparaissent. Une attention constante serait alors le critère de réussite. Mais il est rare que toutes les conditions favorables soient réunies, et lorsque de mauvaises habitudes ont été acquises, seule une approche rigoureuse peut présenter quelque garantie de succès." op. cit., p.8

 

58.L'expérience en classe de FLE nous a montré que cela peut même aller jusqu'à rendre "sourd", c'est-à-dire insensible, à certaines articulations que par ailleurs le sujet est parfaitement capable de distinguer dans sa propre langue.

 

59.A ce propos, F. François rappelle l'évidence suivante: "On peut apprendre à parler sans savoir la linguistique, comme on peut digérer sans connaître la théorie de la digestion." ("Les caractères généraux du langage - Conséquences pedagogiques.", in "De la théorie linguistique à l'enseignement de la langue.", p.9)

 

60.On ne rappellera jamais assez l'intérêt en FLE de l'exercice de lecture, parfois négligé par certains professeurs.

 

61 Sur la place de l'oral dans la classe de langues: "Cette perspective méthodologique met l'enseignant dans l'obligation d'aborder, en même temps que les faits de langue (morphosyntaxiques, sémantiques, stylistiques… ), les faits liés à l'oralité", en particulier "la juste réalisation des sons et de l'intonation, qui permet à la prononciation de remplir ses fonctions phonologique , morphophonologique et phonosyntaxique" M. CALLAMAND, op. cit., .p4

 
 
 
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